Paru en avril 2025 aux éditions Dunod, Le dividende sociétal d’Éric Delannoy n’est pas un livre de plus sur la responsabilité sociale des entreprises. C’est un manifeste intelligent, audacieux et pragmatique, qui propose une refonte du pacte capitaliste sans en renier les fondements économiques. À travers cet essai percutant, l’auteur — président-fondateur du cabinet Tenzing Conseil et économiste engagé — invite dirigeants, responsables RSE et directions financières à reconsidérer la façon dont la valeur créée est redistribuée, en y intégrant un troisième pilier : l’intérêt général.
Une préface signée Pascal DEMURGER
Une partie de la résolution des crises contemporaines tient à un mot simple : le partage". C'est par ses mots que Pascal Demurger ouvre la préface qu'il signe en amont de l'ouvrage. Il rappelle à juste titre qu'il suffirait que "les 200 plus grandes entreprises françaises mettent en place un dividende écologique pour que les investissements verts tricolores suffisent à couvrir les besoins de la transition". Eric Delannoy revient ensuite dans son livre sur les différences entre dividende sociétal, écologique, mécénat, etc.
Un nouveau levier de performance durable
Dans un monde bouleversé par les crises climatiques, sociales et géopolitiques, il ne s’agit plus seulement de “compenser”, mais de redistribuer volontairement une part des bénéfices à des causes sociétales ou environnementales. C’est ce que l'auteur nomme le dividende sociétal : une forme de dividende versé non aux actionnaires ou aux salariés, mais à l’écosystème dans lequel l’entreprise opère.
"Ce dividende d'un genre particulier se définit donc par son intention (servir directement le bien commun) autant que par sa destination (inititatives sans ROI financier, au bénéfice de causes d'intérêt général). il prend tout son sens, voire toute sa puissance d'impact, par sa cohérence (en lien avec la raison d'être de l'entreprise)."
Cette idée simple est aussi puissamment transformatrice qu’elle est économiquement viable. Delannoy y voit une alternative concrète aux injonctions contradictoires entre rentabilité et impact, et une manière crédible de répondre à la crise de légitimité qui frappe une partie du monde économique.
Une approche concrète et méthodique
L’un des mérites majeurs de l’ouvrage réside dans son caractère opérationnel. On y trouve une méthode claire en six étapes pour intégrer le dividende sociétal à la gouvernance de l’entreprise. Pas de théorie abstraite ici : chaque proposition est illustrée de cas concrets — MAIF, Crédit Mutuel, Tenzing ou encore des PME innovantes — qui montrent que cette logique est déjà à l’œuvre, souvent sans avoir été formalisée.
Le livre répond aussi aux principales objections. Oui, un dividende sociétal peut coexister avec une rémunération du capital. Non, il ne met pas en péril la compétitivité. Et surtout, il peut être un vecteur de cohésion interne, en renforçant le sentiment de fierté et d’utilité des collaborateurs, souvent en quête de sens.
Un outil pour les directions RSE… et financières
Ce qui fait l’intérêt particulier de l’ouvrage pour les professionnels de la RSE, c’est son positionnement à l’intersection du pilotage stratégique et de l’innovation sociale. Là où d’autres ouvrages sur la transformation durable s’arrêtent à des principes généraux ou des diagnostics critiques, Delannoy propose un levier financier structurant, qui peut être inscrit dans les statuts d’une entreprise à mission, ou même intégré dans une politique ESG ambitieuse.
Le dividende sociétal, tel qu’il est défendu ici, devient un outil pour réconcilier la logique de profit avec la contribution au bien commun. C’est une manière d’ancrer l’engagement sociétal dans la réalité économique, et non de le reléguer au rang de communication périphérique.
Une proposition politique, au sens noble
Au-delà de la technique, le livre porte une vision politique au sens étymologique du terme : il s’agit de repenser la place de l’entreprise dans la cité. Delannoy insiste : redistribuer volontairement une part de la richesse produite n’est pas un acte de charité, mais un acte de responsabilité. Un geste volontaire qui peut inspirer une dynamique collective, bien plus efficace qu’une taxation imposée par le haut.
À travers des arguments économiques solides, une plume claire et des exemples inspirants, il démontre que le dividende sociétal peut devenir une norme émergente, au même titre que le bilan carbone ou les critères extra-financiers. Il pose aussi une question cruciale : si les entreprises ont les moyens d’agir dès maintenant, pourquoi attendre une régulation ?
Une lecture indispensable pour bâtir l’entreprise contributive de demain
Ce livre n’est pas réservé aux convaincus. Il s’adresse à toutes celles et ceux qui cherchent à réinventer leur modèle sans renoncer à la performance. À l’heure où les labels, les chartes et les indicateurs foisonnent sans toujours produire de résultats tangibles, le dividende sociétal offre une piste structurante, lisible et engageante.
En conclusion, Le dividende sociétal s’impose comme une lecture incontournable pour les professionnels de la RSE, les directions générales, les conseils d’administration et toutes les parties prenantes désireuses d’aller au-delà des discours pour agir. C’est un appel à conjuguer éthique, efficacité et engagement — un triptyque indispensable pour faire face aux défis de notre siècle.
Le Dividende Sociétal d'Eric Delannoy - Editions DUNOD - 2025