Disons-le tout de suite, résumer le livre de Carole Babin Chevaye s’impose comme une tâche impossible tant l’ouvrage nous semble inclassable : un objet iconoclaste, au style fluide qui nous porte autant qu’on le dévore de chapitre en chapitre tant on est happé par ce voyage dans lequel l’auteure nous plonge de façon très directe et tout aussi rafraîchissante dès le prologue.
Cette immersion immédiate se fait par le truchement de ce très attachant renard et de son « apprivoise-moi » lancé à Didier de la Porte, cet agriculteur pas comme les autres que l’auteure nous fait découvrir au fil des pages. Cette histoire qu’il faut absolument pas manquer, est tour à tour intrigante, charmante, confondante, mystérieuse, belle et éclairante sur la relation au monde qui nous entoure.
Car à lire son titre « Cheminer avec le vivant », vous vous attendiez peut-être à une ode à la nature, au travail séculaire de l’agriculteur et au lien avec ses animaux. Oui bien sûr il y a de ça, mais bien davantage. Oubliez vos lectures conventionnelles, et entrez ici dans un monde où le sensoriel et parfois plus (onirisme ? meta-lien ? correspondance avec le vivant ? à chacun son interprétation) se mêlent aux histoires narrées par l’agriculteur à une Carole attentive et parfois interloquée, qui ne cesse d’ailleurs de s’interroger sur ce qui lui est confié. Y a-t-il donc des liens uniques et spécifiques qui s’établissent entre l’homme et l’animal, bien au-delà des simples interactions connues ? Chacun serait-il conscient de la place qu’il a et du rôle qu’il joue dans la conservation et le développement de son écosystème ? En tout cas, Didier de la Porte nous emmène à repenser notre qualité de la relation la faune (et à la flore) comme le moyen le plus sur de renouer réellement avec le vivant.
Et pourtant l’aventure de cet enfant tombé de façon très précoce « en amour » avec la nature et les animaux, n’a pas été un long fleuve tranquille à commencer par son choix de carrière qu’on lui a fortement déconseillé parce qu’il ne pourrait « jamais en vivre ». Bien évidemment, il le fera mais à sa façon, en biodynamie, en écoutant et en reliant au fil du temps les causes et les conséquences pour établir une harmonie entre végétaux mais aussi entre animaux et humains. De la sélection des volailles aux anecdotes de vaches, en passant par les abeilles et les renards, et bien sur les légumes, les portes s’ouvrent, le scepticisme s’amenuise pour laisser place à l’expression singulière de cet homme, de son parcours et ses joies profondes, comme une leçon de vie (d’humanité !) qui ne dirait pas son nom.
C’est d’ailleurs la conclusion de l’auteure : «ainsi, sur fond de toile d’observations et d’interrogations, nous avons traversé les explorations d’un chercheur heureux, relié cœur, corps et âme à ce lieu qui le nourrit pleinement ; un agriculteur aligné avec l’idée d’un chemin de la connaissance unique pour chacun, partant de l’intérieur de l’homme vers plus grand que lui… »
A la fin de ces lignes, nous sommes bien conscients que nous ne vous avons rien raconté du livre (vraiment nous n’avons pas trouvé comment), mais nous espérons vous avoir donné l’envie de l’ouvrir pour toucher un peu à sa magie.
Cheminer avec le vivant, Carole Babin Chevaye, Editions LEDUC - 2021